Ryma Hadbi soutiendra sa thèse de doctorat intitulée :

  • « Faire patrimoine / Faire projet à la Capuche, l’Abbaye et Jean Macé.
    Trois cités d’habitations à bon marché grenobloises des années 1920-1935 aux devenirs contrastés »

vendredi 18 octobre 2024 à 14 heures à la Maison des Habitant-es Abbaye à Grenoble.

  • École doctorale : Sciences de l’Homme, du Politique et du Territoire (SHPT), Université Grenoble Alpes.

Jury :

  • M. Elson PEREIRA – Universidade Fédéral de Santa Catarina (rapporteur)
  • Mme Catherine DESCHAMPS – ENSAPLV (rapporteure)
  • Mme Anne DALMASSO – Université Grenoble Alpes (examinatrice)
  • Mme Sandra FIORI – ENSA Lyon (examinatrice)
  • M. Vincent VESCHAMBRE – RIZE – Ville de Villeurbanne (examinateur)
  • M. Nicolas TIXIER – ENSA Grenoble – UGA (directeur de thèse)
  • M. Jean-Paul THIBAUD – CNRS – ENSA Grenoble, chercheur honoraire (invité).

Résumé :

Notre thèse questionne ce qui fait patrimoine dans trois cités d’habitations à bon marché de Grenoble, construites dans les années 1920-1935 par l’Office public de la Ville, suivant les orientations de la municipalité de Paul Mistral qui souhaitait « faire entrer » Grenoble dans la modernité.
Les cités de la Capuche, de l’Abbaye et Jean Macé ont été conçues comme des éléments structurants de la trame urbaine afin que la ville s’urbanise petit à petit autour d’elles durant le 20e siècle. Bien que similaires dans leur contexte de construction, elles connaissent au fil du temps des évolutions et des transformations qui leur valent des destins différents : la Capuche a été rénovée pour la dernière fois dans les années 1980, Jean Macé a été démolie et reconstruite en 2008, et la cité de l’Abbaye attend d’être réhabilitée depuis 2017 suite à plusieurs années de débats houleux sur son devenir. Ces trois cités sont aujourd’hui des éléments urbains hérités d’une époque remarquable de l’histoire urbaine de Grenoble. Cent ans plus tard, la ville se retrouve de nouveau confrontée à la nécessité de se renouveler sur ces fragments de territoire parfois vieillissants et désuets. De notre point de vue, ces cités HBM ordinaires et discrètes, où la question patrimoniale ne va pas de soi, pourraient s’avérer être des ressources substantielles avec lesquelles la ville de Grenoble peut se réinventer en s’appuyant sur leurs qualités matérielles, sociales et sensibles.

Pour cela, notre thèse défend l’idée que ce qui fait patrimoine dans ces cités s’apparente à un processus dynamique et évolutif qui articule conjointement trois valeurs patrimoniales : une valeur historique, une valeur d’usage et une valeur de renouvellement. Se saisir du patrimoine en postulant qu’il intègre des mutations, des reconductions mais aussi des disparitions et des renouveaux nous permet de décaler la représentation de ce qui fait patrimoine des objets vers les hommes et leur vécu. Ainsi, nous donnons une reconnaissance à des éléments qui d’habitude s’expriment en privé, sur le mode de l’infraordinaire. Dès lors, nous prêtons attention à ce qui compte véritablement pour les habitants de ces lieux plutôt qu’à ce que l’on pourrait garder comme patrimoine bâti. Nous considérons que c’est dans la parole habitante, empreinte d’attachements et d’affects, que s’expriment et s’articulent le mieux ces trois valeurs patrimoniales. En mettant au cœur du processus l’expérience vécue de l’habitant, nous parvenons à faire émerger un récit puissant qui révèle ce qui fait patrimoine à la Capuche, l’Abbaye et Jean Macé pour nourrir tout renouvellement du lieu. Notre thèse aspire à proposer une démarche d’étude à même de penser les mutations de ces lieux dans une relation directe avec leurs habitants en recueillant les récits les plus quotidiens et familiers, les histoires locales, les significations affectives, les pratiques et les usages. Nous pourrions ainsi saisir dans sa complexité la réalité urbaine des lieux, les imaginaires et les modes d’habiter de chacune de ces cités. La démarche méthodologique mise en œuvre conjugue trois méthodes qualitatives principales qui sont l’inventaire, la méthode des itinéraires et la reconduction photographique. Tandis que la démarche analytique permet d’articuler éléments de patrimoine et éléments de projet. Faire patrimoine n’a pas vocation à figer un lieu dans un état et le destituer de sa valeur socio-symbolique au nom d’une mémoire passée et révolue. Bien au contraire, il vise à être une véritable ressource pour le projet urbain en permettant la reconnaissance d’éléments perçus comme bien commun à transmettre, comme qualités essentielles et inhérentes aux lieux et à leurs habitants ; tout en donnant les possibilités de réinventer de nouvelles situations urbaines et sociales.

Mots-clés : Faire patrimoine, attachement au lieu, récit de vie, récit du lieu, imaginaire social, ambiance.