Ce projet de thèse porte sur le sens des masses ou « sens des obstacles », une habilité développée par les personnes non-voyantes leur permettant de ressentir physiquement la présence de masses proches. Combinant une source acoustique et des sensations cutanées, le sens des masses évoque la tonalité globale, impalpable et synthétique des ambiances et s’accorde particulièrement avec la notion d’empathie spatiale à l’origine du phénomène d’attachement dans l’espace urbain. Ce projet de thèse propose ainsi de reconsidérer l’intermodalité du sens des masses et d’étudier son influence sur les phénomènes d’ambiance. Alors que le sens des masses semble lier le corps à l’environnement bâti, son implication dans le phénomène d’ambiance n’a, à notre connaissance, jamais été étudiée.

La thèse développe un double objectif à la fois fondamental et appliqué. Comprendre le sens des masses et son implication dans la perception des espaces vise d’abord à mieux saisir la dimension sensible des environnements bâtis. Ceci offre une nouvelle porte d’entrée pour reconsidérer la fonction contenante de la peau, tout comme des murs et des formes matérielles qui nous enveloppent, renvoyant directement au sentiment de sécurité. Le lien entre les caractéristiques formelles des espaces et le sens de masses est par ailleurs une entrée originale pour la conception architecturale. En effet, l’architecture et l’aménagement urbain ayant pour objet la création et l’agencement des masses dans l’espace, la perspective de caractériser les liens entre le ressenti qu’elles produisent et la forme est novatrice. La thèse permettra ainsi de mieux comprendre la perception de la densité urbaine et de qualifier les théories contemporaines sur la spatialité et la matérialité en architecture. Une meilleure compréhension du sens des masses contribuera à une montée en puissance des approches multi-sensorielles et intégratives dans la conception architecturale et urbaine.