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Ce projet de recherche s’intéresse à la notion de proximité au travers des mécanismes de gouvernance et de mobilisations dans trois métropoles européennes. Discours incantatoires, figures urbaines universelles ou rhétorique clientéliste, ce travail compte s’intéresser aux valeurs discursives et opérationnelles des revendications d’échelle du lien social. L’analyse comparée des dynamiques urbaines entre les villes de Barcelone, Nantes et Grenoble nous permettra de penser les discours actuels portés sur les localités intégrées aux métropoles européennes ainsi que les rapports entretenus avec l’échelle du quartier. Notre méthodologie est emprunte à l’enquête ethnographique « multi-située », par les groupes observés mais aussi par l’espace. Nous proposons l’analyse de « monographies comparées » entre trois métropoles reliées dans ce travail par leur différence de taille ainsi que par le volontarisme dont font preuve leur gouvernement municipaux et/ou métropolitains en matière de démocratie locale.

Notre travail de thèse porte sur la place de l’espace « du proche » dans les débats sur l’aménagement urbain et la reconfiguration des modes de gouvernances territoriales liées à l’échelle métropolitaine. Par espaces de « proximité » nous entendons ce qui relève du régime de familiarité sollicité par des groupes ou des collectifs d’acteurs et qui le mobilise comme registre de justification. Soucieuse de quotidienneté, de solidarité, l’idée de proximité est énoncée depuis plusieurs années comme une valeur ajoutée à l’espace urbain. Devenant source et outil de légitimation de l’action publique urbaine elle l’est aussi pour des groupes d’acteurs qui lui sont opposés et s’inscrit donc pleinement au cœur des controverses sur l’aménagement de l’espace. Cette enquête a comme ambition d’interroger les « fronts de légitimité » des pouvoirs urbains, municipaux et métropolitains, au regard de mobilisations d’acteurs divers dans le champ de l’aménagement et de l’urbanisme. Elle s’intéresse aussi au potentiel de politisation et de dépolitisation que peut faire émerger cette notion.

En effet, à cette vaste question « comment faire la ville aujourd’hui ? », notre hypothèse suppose que la notion de proximité est devenue un réservoir de solutions face aux grands maux de la ville contemporaine (les grands ensembles ghettoïsés ou l’étalement urbain écologiquement irresponsable par exemple). Chez le public comme chez les spécialistes, l’image de la ville dense associée à l’intensité des qualités de vie du village offre une réponse appropriée et harmonieuse à ces préoccupations. L’échelon local et le quartier sont, pour le grand public comme pour les décideurs, le lieu de l’enracinement de sociétés nécessairement structurées par des identités et des communautés. Les politiques de la ville en Europe semblent réactiver l’espace micro-local comme cadre d’action depuis plusieurs décennies et valorisent une échelle de l’intervention politique construite sur la mise en valeur de la proximité.

Nous nous proposons alors de regarder précisément les usages de ces discours sur la ville comme entité porteuse de « sociabilités villageoises » au travers de trois catégories d’acteurs : politiques, professionnels et habitants, et leur application dans le domaine opérationnel. Ces observations seront mises au regard des sociabilités « en actes » observées notamment dans des espaces de frictions et de débats comme le sont de plus en plus les instances participatives sur l’aménagement des villes. Ce projet tentera alors de dénouer et d’apporter des réponses à des dynamiques actuelles de changement d’échelles de gouvernances, de renforcement du marketing urbain et des dynamiques associatives, militantes ou habitantes en mutation. Cette recherche permettra alors de compléter les travaux sur la gouvernance urbaine en posant la question de la localité des métropoles comme levier de l’action publique aménageuse. Nous attendons de ce travail des apports à la fois théoriques concernant les processus de mobilisation des citoyens urbains, mais aussi méthodologiques afin d’interroger la posture de l’engagement « multi-situé » dans l’enquête.

EN

Supervision: thesis supervisor Laurent Devisme (AAU-CRENAU ensa Nantes), Gilles Pinson (Centre Emile Durkheim, Sciences Po Bordeaux)

Funding: doctoral contract funded by the French Ministry of Culture and the Pays de la Loire Region

This research focuses on the concept of proximity through mechanisms of governance and engagement in three European cities. Incantatory speeches, universal urban figures or clientelist rhetoric, this study deals with the discursive and operational values of the demands regarding the scale of social bonds. The comparative analysis of urban dynamics in Barcelona, Nantes and Grenoble will allow us to reflect on the current discourses about the localities integrated to European cities. It will also enable a reflection on the relations to the neighbourhood scale. Our method is borrowed from the “multi-situated” ethnographic survey, focusing on the observed groups and the space. We propose to analyse “comparative monographies” between three cities. They are brought together in this study because of their difference in size and of the voluntarism demonstrated by their municipal and/or metropolitan governments in terms of social democracy.

This thesis deals with the place of “close” space in the debates on urban development and with the reconfiguration of modes of territorial governance on the metropolitan scale. The term of “spaces of proximity” is understood as everything revolving around the familiarity that is generated by groups or collectives and used as justification. Concerned with everydayness and solidarity, the concept of proximity has been studied for a few years already as an added value to urban space. As a source and a tool for the legitimisation of urban public action, it takes on the same status for groups that are resisting it and thus belongs to the heart of debates on spatial planning. This study aims to question the legitimacy of urban, municipal and metropolitan authorities regarding the engagement of different actors in the field of planning and urbanism. It also focuses on the politicisation and depoliticization that can emerge from this concept.

Indeed, to the broad question of “how to build a city today?”, our hypothesis assumes that the concept of proximity has become a source of solutions to the great woes of the contemporary city (e.g. ghettos or the environmental irresponsible urban spread). For the general population as for the specialists, the image of a dense city, associated with the intense living standards of the town, represents an appropriate and harmonious response to concerns. For the public and decision-makers, the local scale and the neighbourhood are places of grounding for societies that are essentially structured by identities and communities. Urban policies in Europe appear to have been reactivating the micro-local space as an action framework for a few decades. They favour a scale for political intervention that is built on the promotion of proximity.

Therefore, we propose to examine the uses of the discourses regarding the city as entities that carry “village sociabilities” through three categories of actors: political, professional and inhabitant. We will also study the application of such discourses in the operational field. These observations will be put in relation to sociabilities “in action”, observed in particular in conflict and debate spaces, which is increasingly the case of participatory bodies on the planning of cities. This project will thus aim to untangle and answer some of the current dynamics in terms of scale changes regarding governance, strengthening of urban marketing and associative, activist or inhabiting dynamics undergoing change. This work will complete research projects on urban governance by asking the question of the locality of cities as a lever for public actions on planning. We expect this work to provide both theoretical elements regarding the engagement processes of urban citizens and methodological components in order to question the position of “multi-situated” engagement within the study.