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Blocages, retards, reports, relocalisations, contestations et abandons font partie de la réalité des processus d’aménagement d’aujourd’hui. Les mobilisations et la contestation de grands projets d’aménagement sont fréquentes et fortement médiatisées. Elles prennent différentes formes : allant de la prise de parole dans les médias, de la participation aux processus de consultations institués ou à l’ouverture d’un espace alternatif de délibération (Trudelle et al. 2016) ; et elles se jouent sur différents registres : que ce soit, par exemple une critique de type « pas dans ma cour » ou encore de type « ni ici ni ailleurs » qui prime vis-à-vis de certains projets jugés insensés dans le contexte actuel de dérèglements climatiques. Bien que les controverses et les mobilisations aient été centrales dans l’histoire de la transformation de la ville (Castells 1972), cet esprit de confrontation aurait laissé la place à un contexte de partenariat et de gouvernance à partir des années 1980 avec l’institutionnalisation d’un certain nombre d’acteurs sociaux (Fontan et al. 2012). Ces années ont aussi vu la multiplication des processus de participation dans le domaine de l’aménagement et de l’urbanisme, où les citoyen-ne-s sont invités à « participer » et « délibérer » dans un esprit de collaboration. Sans pour autant mener à la fin des mobilisations urbaines, ce nouveau contexte participatif, délibératif et/ou partenarial, n’est pas dénué de confrontation et d’opposition. Ainsi, la construction de la ville se fait dans une tension entre conflit et concertation (Bobbio et Melé 2015). L’objectif central de la thèse est donc de comprendre le phénomène que représentent les conflits en aménagement, et d’interroger leur apport dans la fabrique de la ville[1].

Pour ce faire, un regard approfondi sera porté sur deux projets d’aménagement conflictuel dans les villes de Nantes et de Montréal, une étude de cas multiples rendue possible et facilitée par le contexte de cotutelle internationale de thèse dans lequel cette recherche doctorale s’inscrit. Les deux projets à l’étude sont,  à Nantes, un projet de nouveau stade privé de football à Nantes - le Yellopark, et à Montréal, un projet de centre commercial et de divertissement - le Royalmount.  En suivant les trajectoires que prennent ces deux conflits, il s’agit de mettre en lumière l’évolution de la configuration des acteurs impliqués et de leurs revendications et propositions, ainsi que les opérations associées à la construction de sens dans l’élaboration et la contestation d’un projet d’aménagement - au fil des différents « moments » du conflit.

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Bobbio, Luigi et Patrice Melé. 2015. « Introduction. Les relations paradoxales entre conflit et participation. » Participations 13 (3): 7‑33.

Castells, Manuel. 1972. La question urbaine. Paris: François Maspero.

Devisme, Laurent, Marc Dumont et Élise Roy. 2007. « Le jeu des «bonnes pratiques» dans les opérations urbaines, entre normes et fabrique locale. » Espaces et sociétés (4): 15–31.

Devisme, Laurent. 2014. « Urbanographie/urbanologie : les traverses de la fabrique urbaine. » ENS Lyon.

Fontan, Jean-Marc, Pierre Hamel et Richard Morin. 2012. Ville et conflits: action collective, justice sociale et enjeux environnementaux. Québec: Presses de l’Université Laval.

Trudelle, Catherine, Juan-Luis Klein, Jean-Marc Fontan, Diane-Gabrielle Tremblay et Christophe Bocquin. 2016. « Conflits urbains, compromis et cohésion socioterritoriale: le cas de la Tohu à Montréal. » Revue d’Économie Régionale & Urbaine: 417‑446.

[1] La fabrique de la ville réfère ici aux « activités intentionnelles de transformation spatiale » (Devisme, 2014), que l’on peut diviser en deux moments différents, celui de l’élaboration et de la planification et celui de la mise en oeuvre, de la concrétisation et de la mise à l’épreuve des opérations urbaines (Devisme et al. 2007).

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Nowadays, stalemates, delays, postponements, resettlements, protests and abandonments are realities in development processes. The mobilisations and protests of big development projects are common and highly covered by the media. They take different shapes: from speaking to the media, the participation to instituted consultation processes to the opening of an alternative space to deliberate (Trudelle et al. 2016). They also deal with different registers: whether it is, for example, criticism like “not in my backyard” or like “not here not anywhere” that predominates in certain projects considered senseless in our current context of climate change.

While controversies and mobilisations have been central in the history of the transformation of cities (Castells 1972), the spirit of confrontation left way for a context of partnership and governance, starting from the 1980s, with the institutionalization of quite a few social actors (Fontan et al. 2012). These years have also witnessed the multiplication of participation processes in urban planning and urbanism, in which citizens are invited to “take part” and “deliberate” in a collaborative spirit. Without leading to the end of urban mobilisations, this new participative, deliberative and/or partnership context is not devoid of confrontation and opposition. Therefore, the construction of the city takes place within a climate of tension between conflict and consultation (Bobbio et Melé 2015). The main objective of the thesis is thus to understand the phenomenon represented by the conflicts in urban planning and to question their input in the construction of the city[1].

To do so, an in-depth look will be given to two conflictual urban planning projects in Nantes and Montreal. This multiple-case study is possible and enabled by the international thesis co-supervision of this doctoral research. The two projects in question are: In Nantes, the project of a new private football stadium – the Yellopark; in Montreal, a shopping and entertainment centre project – the Royalmount. By following the trajectories that the two conflicts take, we aim to highlight the evolution of the configuration of actors involved and their claims and propositions, as well as the operations associated with the construction of meaning in the development and contestation of the project – throughout the different “moments” of the conflict.

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Bobbio, Luigi et Patrice Melé. 2015. « Introduction. Les relations paradoxales entre conflit et participation. » Participations 13 (3): 7‑33.

Castells, Manuel. 1972. La question urbaine. Paris: François Maspero.

Devisme, Laurent, Marc Dumont et Élise Roy. 2007. « Le jeu des «bonnes pratiques» dans les opérations urbaines, entre normes et fabrique locale. » Espaces et sociétés (4): 15–31.

Devisme, Laurent. 2014. « Urbanographie/urbanologie : les traverses de la fabrique urbaine. » ENS Lyon.

Fontan, Jean-Marc, Pierre Hamel et Richard Morin. 2012. Ville et conflits: action collective, justice sociale et enjeux environnementaux. Québec: Presses de l’Université Laval.

Trudelle, Catherine, Juan-Luis Klein, Jean-Marc Fontan, Diane-Gabrielle Tremblay et Christophe Bocquin. 2016. « Conflits urbains, compromis et cohésion socioterritoriale: le cas de la Tohu à Montréal. » Revue d’Économie Régionale & Urbaine: 417‑446.

[1] The construction of the city refers here to “intentional activities of spatial transformation” (Devisme, 2014), which we can divide into two different moments: elaboration and planning, and;