Les écrits de Heidegger sur l’habitation, en particulier la célèbre conférence qu’il donna à Darmstadt en août 1951, intitulée « Bâtir Habiter Penser », font depuis les années 1950 l’objet de nombreux usages dans diverses disciplines scientifiques et artistiques. La pensée de l’habiter s’est en effet largement diffusée dans les sciences humaines et sociales de langue française, surtout en sociologie, en géographie et en psychologie, mais elle a également imprégné, de façon plus surprenante encore, la réflexion et la pratique de l’architecture et de l’urbanisme en Europe.

Si elle est un fait bien connu, cette réception singulière et inattendue de Heidegger n’a pas encore été étudiée comme telle et pour elle-même, c’est-à-dire comme un phénomène intellectuel qui a une histoire et qui est le produit d’une histoire. C’est cette étude que nous entreprendrons dans cette thèse, en nous concentrant sur ses moments les plus significatifs et en la resituant dans le contexte historique de la crise du logement. Il s’agit ainsi de retracer les migrations diverses des concepts heideggériens par-delà les frontières disciplinaires, pour comprendre leurs effets dans les discours et dans les pratiques et mesurer les transformations qu’ils connaissent au fil de leurs usages.

Par l’étude de cette histoire commune, nous souhaitons prendre part à l’autoréflexion des chercheur·es et des architectes et urbanistes sur leurs savoirs et leurs pratiques. D’un autre côté, nous voulons contribuer au questionnement sur l’habitat, en tâchant d’interroger l’actualité de la pensée de l’habiter face aux enjeux contemporains, pour la remettre au travail enrichie de ses échos multiples.

 

Mots clés : philosophie, Heidegger, architecture, urbanisme, sciences humaines et sociales,  habiter, crise du logement.