Le projet Atelier de troubles épistémologiques débute en 2019 avec la résidence de Cheikh Ndiaye au Musée Théodore Monod de l’IFAN à Dakar.

Conçu comme une dynamique collective internationale et prospective alliant chercheurs, artistes et dépositaires de différents savoirs, ce projet articule Recherche/Production/Enseignement en s’appuyant sur des résidences d’artistes au Musée Théodore Monod et la production d’œuvres revisitant les notions de patrimoine, de savoirs et les théories de la connaissance.

  • Une première rencontre dialoguée avec Cheikh Ndiaye, Emmanuelle Chérel et les artisans impliqués dans ce projet est proposée mercredi 27 février à 14 heures.Mamadou Khouma Gueye proposera également à 18 heures, une projection des films Le visiteur d’Uriel Orlow (2007), Les statues meurent aussi de Chris Marker et Alain Renais (1953), et des extraits de La noire de… d’Ousmane Sembène (1967). Cette séquence sera suivie d’un moment d’échanges.

Ce projet de recherche est mené par El Hadji Malick Ndiaye, docteur en histoire de l’art, conservateur intérimaire du musée Théodore Monod et Emmanuelle Chérel enseignante-chercheure à l’Ecole des Beaux Arts de Nantes Saint-Nazaire, rattachée au laboratoire AAU-CRENAU, à l’ENSA Nantes.

Biographies :

  • Cheikh Ndiaye est né en 1970 à Dakar, il vit et travaille à New York et à Dakar. Diplômé de l’École Nationale des Beaux-Arts de Dakar et de Lyon, il a participé à de nombreuses expositions en Afrique et en Europe. Son travail est entré dans les collections permanentes de la Kadist Art Foundation et du Centre Pompidou. En 2012, exposition personnelle Cinémas Africa au Musée Africain de Lyon, France, en 2013, exposition (In)formal Visitation à la galerie Cécile Fakhoury – Abidjan. En 2014, son travail est présenté au Centre de Photographie de Genève, Suisse, dans l’exposition Against the grain : la photographie à contre-courant.  En 2015, il présente l’installation Blancheur rigide dérisoire en opposition au ciel dans l’exposition internationale de la 56ème Biennale de Venise, All the World’s Futures, commissaire Okwui Enwezor.  Son travail est présenté  dans l’exposition Qu’il est loin mon pays à la Fondation Blachère à Apt en France en 2016 puis dans Hippocampus à La Maréchalerie de Versailles en 2017 et cette même année, la galerie Cécile Fakhoury lui consacre une deuxième exposition personnelle, Faire de la rue un salon d’extérieur, à Abidjan. Il a participé à l’exposition Contours de la 12e Biennale de Dakar avec l’installation Privatisation d’un espace par son ciel, présentée à Kër Thiossane dans le cadre du festival Afropixel #5. Ses œuvres ont notamment aussi été exposées dans la sélection internationale de la Biennale Dak’Art 2012 et 2018. Il est lauréat du prix Natulis Art Temporary, Berlin, Allemagne en 2012 et lauréat du prix Linossier, France en 2008
  • Mamadou Khouma Gueye, après des études d’Histoire à l’Université de Dakar,  s’est lancé dans le cinéma en militant pour l’accès au cinéma  pour la population de la banlieue de Dakar puis de passer à la réalisation. Jouant de la débrouille et puisant dans l’énergie collective de sa génération pour produire et diffuser leur cinéma. Il défend l’idée que l’art doit faire place aux gens ordinaires, et participer à la représentation et à la prise de conscience des réalités sociales et politiques, parfois difficiles. Films en cours: Les Musiciens du vendredi, documentaire, 52 min. Les Films de l’Atelier, Résidence d’écriture et Rencontres Tënk de coproduction de Saint-Louis, Africadoc, Résidence d’écriture documentaire de Safi (Maroc). Derniers films : Saraba, web-documentaire, 2017. Pencoo, documentaire, 2018. Kedougou, documentaire, 23 min, 2017, a reçu le Tanit de Bronze 2018, section court-métrage documentaire aux Journées Cinématographiques de Carthage, Tunisie et le Grand prix du Jury AIRF 2018, section court-métrage documentaire au Festival du film documentaire de Saint-Louis, Sénégal, nov. 2017

Les films :

Le visiteur (2007) est un essai photographique de l’artiste Uriel Orlow avec Oba Erediauwa, qui fut le roi du Bénin. Un narrateur local suit l’artiste dans le palais de l’Oba et raconte la conversation entre le visiteur européen et l’hôte royal et sa cour des chefs. Les échanges portent principalement sur les bronzes du Bénin (qui ont été pillés par les Britanniques en 1897 et plus de 500 musées et collections dans le monde), la mémoire collective et la demande de restitution. Cependant, la communication reste quelque peu insaisissable, glissant entre les différences culturelles et historiques.

Les statues meurent aussi (1953) est un court métrage documentaire de Chris Marker et Alain Resnais. Ce film, commandé par la revue Présence africaine, part de la question « Pourquoi l’art nègre se trouve-t-il au musée de L’homme alors que l’art grec ou égyptien se trouve au Louvre ? », les réalisateurs dénoncent le manque de considération pour l’art dans un contexte de colonisation et relèvent le racisme manifeste derrière des choix. En France, du fait de son point de vue anti-colonialiste, le film reste interdit par la censure pendant 11 ans. « Quand les hommes sont morts, ils entrent dans l’histoire. Quand les statues sont mortes, elles entrent dans l’art. Cette botanique de la mort, c’est ce que nous appelons la culture. » Le film peut être mis en regard avec l’exposition qui se déroule actuellement au Musée de l’histoire de l’immigration, à Paris intitulé Les statues meurent aussi – Sur les traces de l’histoire coloniale française, des artistes de Jan Mammey, Falk Messerschmidt et Fabian Reimann qui se sont penchés sur le passé colonial français.

La noire de… Ousmane Sembène (1967), premier long métrage du réalisateur, influencé par l’art des griots et la culture orale, est un poème incantatoire et militant, centré sur le sentiment d’enfermement et d’aliénation ressentie par une jeune femme sénégalaise, quasiment cloîtrée dans la maison de ses patrons dans le Sud de la France. Déracinée et exploitée, elle se réfugie dans un silence de protestation, tenant tête avec obstination à sa maîtresse. Mbissine Thérèse Diop, étoile filante du cinéma africain, traduit avec nuances le trouble qui anéantit progressivement son personnage. Le film est subtil dans l’usage des symboles, à l’image du masque de l’enfant, simple objet utilitaire au début de l’intrigue, et qui deviendra un outil de protestation. La Noire de… est une charge virulente contre le néocolonialisme, le racisme décomplexé de Madame et Monsieur reflétant l’arrogance des puissances du Nord, surfant entre le paternalisme et l’humiliation avec une aisance incroyable.

En savoir plus

© Photo : bâtiments historiques, site web https://tourismedakaricd.wordpress.com